Traditions asiatiques

L'art de la marionnette en Asie est un art plus que millénaire qui manifeste, dans plusieurs cultures, un degré élevé de raffinement. Un grand nombre de formes théâtrales traditionnelles intègrent les dimensions plus profanes du divertissement avec les dimensions plus spirituelles de la transmission des mythes et des doctrines.

On considère l'Inde et la Chine comme les berceaux de plusieurs traditions du théâtre de marionnettes asiatique. Les deux épopées mythologiques hindoues, le Mahabharata et le Ramayana, œuvres littéraires indiennes d'importance, forment la base du répertoire de nombreux théâtres de marionnettes. L'influence de l'Inde se fait sentir dans les traditions birmane, thaïlandaise, cambodgienne, malaisienne, javanaise et balinaise d'Indonésie. L'influence des traditions chinoises, plus séculaires, s'étend à la Corée du Sud et du Nord, au Japon et au Vietnam.

Le théâtre de marionnettes occidental du XX^e siècle a été grandement influencé par plusieurs formes théâtrales asiatiques que l'Europe découvrait, entre autres, au tournant du siècle, lors des grandes expositions universelles. La marionnette à tige, si répandue aujourd'hui, vient de l'imposante tradition théâtrale javanaise, alors que le théâtre bunraku du Japon, avec sa façon particulière de manipuler à vue les marionnettes, introduisait une nouvelle relation manipulateur/marionnette, voire une nouvelle conception de la représentation théâtrale.

Le wayang indonésien

Java et Bali possèdent une très riche tradition de théâtre de marionnettes. Deux des formes théâtrales les plus importantes sont le wayang kulit, un théâtre d'ombres qui se retrouve dans les deux îles, et le wayang golek, un théâtre de marionnettes à tige, spécifique à Java.

Les récits mis en scène sont, en grande partie, tirés du Mahabharata et du Ramayana. Le répertoire du wayang golek se compose également de récits d'influence islamique. De nobles princes et princesses, des dieux, des démons et de sages clowns peuplent les multiples épisodes où s'entremêlent des batailles flamboyantes, des poèmes d'amour, des leçons philosophiques, des bouffonneries, sans compter les remarques satiriques sur l'actualité locale. Le dalang, artiste hautement respecté, est le maître incontesté de ce théâtre. Il anime les ombres ou les marionnettes, déclame et chante récits et poèmes, prête une voix différente à chaque personnage, improvise les farces et dirige le gamelan, un orchestre à sonorités de gongs. Traditionnellement, un spectacle de wayang est présenté à l'occasion d'événements qui marquent un changement important dans la vie, comme un mariage, une naissance ou des funérailles. La représentation, à laquelle enfants et adultes assistent, débute habituellement au coucher du soleil et peut durer toute la nuit.

Le bunraku du Japon

Le bunraku est une forme théâtrale extrêmement raffinée qui s'est développée au Japon à partir du XVII^e siècle. De majestueuses poupées, qui peuvent mesurer jusqu'à 145 cm, sont animées à la vue du public par trois manipulateurs qui doivent synchroniser parfaitement leurs gestes. L'art du bunraku consiste à rendre les mouvements de la marionnette si vivants que le spectateur oublie la présence des manipulateurs. Tandis que les marionnettes jouent l'action, un narrateur, assis près de la scène, raconte l'histoire, interprète les voix des personnages et déclame le texte poétique. Un musicien accompagne le récit en jouant d'un instrument à trois cordes, le shamisen, qui contribue à créer une atmosphère dramatique.

Le répertoire du bunraku, composé notamment de pièces écrites par le dramaturge Chikamatsu, s'adresse essentiellement à un public adulte. Ces pièces classiques dont les personnages sont des guerriers samouraïs, des aristocrates ou des bourgeois du XVIII^e siècle, mettent en scène des drames au dénouement souvent tragique, où les héros doivent choisir entre la passion et le devoir, entre l'amour et l'honneur.